Le Gégé a organisé son départ sans bruit et sans grande forfanterie. Un déménagement, un établissement permanent en Belgique, rien de plus légal que cela ; la Belgique est un pays européen et la libre circulation des personnes en Europe est à la base même de la construction européenne.

Ce n’est pas l’artiste qui a lancé la polémique. C’est le Premier Ministre qui a mis le feu aux poudres en traitant le comportement de Depardieu de minable.

Gérard Depardieu a répondu à cette seule attaque, en une lettre plutôt bien tournée qui a provoqué la bronca de la gente socialiste de gouvernement.

Plus que l’exil fiscal de Depardieu, c’est qu’il n’ait pas accepté de subir sans broncher l’attaque du Premier Ministre qui a provoqué les réactions indignées des groupies du premier pianiste.

Tous s’en sont allés d’une diatribe qui visait surtout à laver l’honneur bafoué de Jean-Marc Ayrault. On a même fait jouer la grosse caisse, avec Michel Sapin, le porte flingue de Hollande, toujours au front sur les coups difficiles. Il est mignon Michel Sapin avec des plans com à deux balles où il combine la fausse modestie de celui qui a des heures de vol en politique, tellement d’heures de vol qu’il pourrait même remplacer Ayrault si que des fois celui-ci en avait marre, et les références qui vont bien pour rappeler qu’il est le pote, le poteau, le frérot, du Président, le vrai conseiller, le vrai porte-parole de François.

Mais dans ce concert de diatribes, la plus intéressante est celle de Aurélie Filippetti. Comme ses camarades, elle s’est placée sur le terrain de la morale, du civisme, de la nécessaire solidarité en temps de crise, patin-couffin.

Alors il faut rappeler à tous, et plus particulièrement à la ministre de la culture que Gérard Depardieu ne fait qu’utiliser une disposition légale que d’autres ont pratiqué avant lui sans provoquer la moindre réprobation.

Il existe une convention fiscale entre la France et la Belgique ; sans doute est–elle là pour servir ; sans doute est-elle là pour organiser précisément l’installation d’un contribuable français en Belgique et vice-versa. Il est raisonnable d’escompter que ce qui a été mis en place avec du droit positif est légal et même légitime.

Ce qui est incompréhensible de la part de Mme Filippetti, c’est qu’elle pousse ces cris d’orfraies quelques semaines seulement après qu’elle s’est battue pour exonérer les œuvres d’art de l’ISF. A tous ceux qui font l’honneur de lire ces lignes et viennent de s’écrier en pensée, « mais cela n’a rien à voir ! », je demande de réfléchir objectivement quelques secondes et reconnaître que cela a tout à voir. C’est exactement le sujet. La position du gouvernement sur les oeuvres d’art est que cela conduirait à l’exil de celles ci ; en fait à l’exil fiscal de leurs possesseurs, car autrement, qu’il les détienne à l’étranger ou qu’il s’en sépare, l’amateur d’art domicilié fiscalement en France aurait continué à payer le même ISF. Le gouvernement a, en fait, exonéré les œuvres d’art pour éviter que les propriétaires soient tentés de l’exil.

Alors pourquoi reprocher à Depardieu de s’exiler ?

Parce que les socialistes ont une approche purement esthétique des raisonnements et de la justice. Est juste ce qui paraît juste à leurs yeux. Un collectionneur d’art est esthétique. Depardieu n’est pas esthétique.

Et aussi parce tout cela est fait à l’émotion, sans jamais approfondir la cohérence de l’ensemble. Et on soutient l’exonération des œuvres d’art en novembre et on injurie Depardieu en décembre.